Photos de la manifestation de Mobilisation-Turcot

Après la terrible nouvelle que « [l]es émissions de GES ont connu une augmentation record [de 5% en 2010] et [que] la fenêtre d'une intervention internationale efficace sur le climat s'amenuise » (Louis-Gilles Francoeur, L’urgence augmente, et l’Amérique ne répond plus, Le Devoir, 4 juin 2011), la manifestation contre la reconstruction de l’échangeur Turcot tombait pile car « nous savons que le secteur des transports est responsable pour moitié à Montréal de la production des gaz à effet de serre [d’où notre demande] que le ministère des Transports mette rapidement en place un plan de mitigation reposant sur le transport en commun. Il n’y aura qu’un pas supplémentaire à faire pour que ces mesures deviennent permanentes. […] Nous leur demandons de revoir le projet Turcot en y intégrant une offre structurante de transport collectif afin de réduire la dépendance à l’automobile et nous permettre d’entrer enfin dans le 21^iè siècle. » (Déclaration de Mobilisation-Turcot à la manifestation)

Les nouvelles télévisées de Radio-Canada ont plutôt choisi de signaler à gros traits qu’il n’y avait que 200 personnes, à mon avis un peu plus, à cette manif sous le thème « Turcot, solution rétro »… d’où les vieilles bagnoles qui ouvraient la marche et les habillements mode 1950 de quelques manifestantes (voir photos). Mais, certes, il n’y en avait pas des milliers. Manifestement, les organisations syndicales et populaires membres de Mobilisation-Turcot n’avaient pas poussé la pédale au fond. Il faut aussi avouer que la thématique rétro, une bonne idée en soi, pouvait difficilement servir d’argument clef pour la mobilisation. Il est aussi vrai que la crise climatique touche encore peu le tissu socio-économique du sud du Québec — au nord c’est une toute autre affaire — sauf pour les riverains du Richelieu et certains de l’estuaire du St-Laurent. Il est vrai que la crise/stagnation économique cogne dur et retient plus l’attention. Pourtant

« le seuil de 32 milliards de tonnes (gigatonnes ou Gt) de GES par année, soit le sommet d'émissions anticipé pour 2020 et qui constitue la borne ultime à ne jamais dépasser, sera vraisemblablement atteint en 2012, soit neuf ans plus tôt. […] Le seuil d'émissions de 32 Gt, s'il n'était atteint qu'en 2020, permettrait à la planète d'avoir une chance sur deux — pas plus! — de plafonner la hausse moyenne du climat à deux degrés Celsius. Au-delà de 2 °C, le réchauffement climatique risque de devenir hors contrôle, car il amorcera une phase d'auto-alimentation à peu près impossible à arrêter. En effet, la hausse du climat terrestre libérera des milliards de tonnes de méthane enfouies dans le pergélisol nordique et au fond des mers sous forme d'hydrates de méthane, une sorte de glace qui s'enflamme au contact de l'oxygène! Et cette contribution additionnelle du méthane, un gaz 23 fois plus actif comme GES que le CO2, coïncidera avec une réduction croissante de la capacité des mers à absorber le gaz carbonique. […] Cette semaine, Christina Figueres, la nouvelle patronne du Secrétariat de la Convention sur les changements climatiques, déclarait qu'il faudrait cibler désormais 1,5 °C afin d'augmenter les chances de la planète d'éviter l'auto-emballement de la hausse du climat .» (Louis-Gilles Francoeur)

Pour l’instant, le peuple québécois fait toujours confiance à ses politiciens d’où la vague orange au fédéral. Cinq députés NPD étaient d’ailleurs présents tout comme trois du PQ et des élues de Projet-Montréal et de Vision-Montréal. Mais ce n’était pas assez prioritaire pour la direction nationale de Québec solidaire, député inclus, qui brillait par son absence. Pourtant, cet enjeu est la priorité de la région de Montréal de Québec solidaire et, à mon avis, son importance en fait un enjeu national comme l’a suggéré la nouvelle députée Nicole Leblanc du NPD. Heureusement, l’implication de la région de Montréal de Québec solidaire dans Mobilisation-Turcot a valu un droit de parole à son porte-parole homme qui a fort à propos souligné l’importance de la mobilisation pour renverser la vapeur. Avec un peu de chance, la direction nationale de Québec solidaire publiera sur la page d’accueil de son site web la prise de position de la région de Montréal, dont un résumé a été largement distribué à la manif, au lieu de l’enfouir ni vue ni connue dans le site. Peut-être jugera-t-elle qu’elle mérite un communiqué de presse ? Pour qu’il y ait une vague orange en 2012 ou 2013 au Québec, il faudra davantage que de la politique-spectacle mais la promotion haut et fort d’alternatives consistantes.

On se dit qu’il faudrait au Québec un coup de Place Tahir ou de Plaza del Sol… au parc Émilie-Gamelin, ou peut-être une occupation de l’édifice du parlement à la mode Wisconsin.

Marc Bonhomme, 5 juin 2011